Les autorités sanitaires mettent en garde contre les risques potentiels graves liés aux médicaments contre la chute des cheveux
Les autorités sanitaires américaines et européennes mettent en garde le public contre les risques potentiels pour la santé liés au finastéride, un médicament populaire contre la perte de cheveux.
L'Agence européenne des médicaments a émis une alerte jeudi, confirmant que des pensées suicidaires étaient un effet secondaire des comprimés de finastéride. Le régulateur européen a annoncé la mise en œuvre de nouvelles mesures pour avertir et protéger le public.
Cette décision fait suite à une alerte émise par les autorités sanitaires américaines fin avril, qui mettaient en garde contre la possibilité de dysfonctionnement sexuel et de dépression liés au finastéride topique, une version plus récente du médicament appliquée directement sur la peau.
« Il n’existe aucune formulation topique de finastéride approuvée par la FDA », a déclaré l’agence dans l’alerte, ajoutant que la sécurité, l’efficacité ou la qualité de ces produits n’ont pas été évaluées.
« Il existe des risques potentiellement graves associés à l’utilisation de produits topiques composés à base de finastéride. »
Bien que le finastéride topique soit également de plus en plus populaire au Canada, un porte-parole de Santé Canada a confirmé la semaine dernière qu’il n’avait jamais été approuvé ici non plus.
La version comprimé du médicament contre la chute des cheveux, également commercialisée sous le nom de Propecia, est associée aux mêmes effets secondaires rares mais graves. Approuvé par la Food and Drug Administration (FDA) des États-Unis et Santé Canada, il est commercialisé depuis 30 ans.
Ces dernières années, le finastéride topique a été popularisé par plusieurs nouveaux sites de télémédecine axés sur la santé masculine. Ces gels ou lotions sont souvent commercialisés comme ayant moins d'effets secondaires que le finastéride oral.
En février, l'émission d'enquête Enquête de Radio-Canada a publié une enquête sur ce médicament, qui présentait les témoignages de 25 hommes affirmant que le finastéride oral ou topique avait provoqué des effets secondaires dévastateurs.
Les symptômes mentionnés dans le communiqué de la FDA font écho à ceux décrits par ces hommes aux journalistes. L'agence affirme avoir recensé 32 cas d'effets indésirables liés au finastéride topique au cours des cinq dernières années, avec des symptômes tels que l'anxiété, le brouillard cérébral, la dépression, les pensées suicidaires, l'insomnie, la baisse de libido, la dysfonction érectile et les douleurs testiculaires.
Wei Wong, un Montréalais à qui on a prescrit du finastéride topique en 2023, a déclaré qu'après 10 jours d'utilisation du sérum contre la perte de cheveux, il a développé des effets secondaires débilitants qui continuent de l'affliger.
Wong a affirmé qu'on ne lui avait pas dit que le produit n'était pas approuvé par Santé Canada et qu'il avait choisi le finastéride topique parce que ses recherches suggéraient qu'il causait moins d'effets secondaires que les comprimés de finastéride.
Plusieurs hommes interrogés par Radio-Canada ont également cette impression : certains affirment que lorsqu'ils ont commencé à ressentir les effets secondaires du finastéride oral, leur médecin leur a conseillé de passer à la version topique « plus douce ».
Wong estime que ce nouvel avertissement de la FDA contribuera à réduire le nombre d'hommes qui subissent les effets secondaires parfois débilitants du finastéride.
« Je suis cependant perplexe face à ce cadrage paradoxal ; l'avertissement cite les effets secondaires persistants du finastéride topique, explique que le finastéride topique devrait pénétrer dans la circulation sanguine comme le fait le finastéride oral, reconnaît que les effets secondaires signalés sont identiques à ceux du finastéride oral, et conclut en quelque sorte que le finastéride oral est approuvé par la FDA et donc sûr », a écrit Wong dans un courriel.
Commercialisation illégale du finastéride topique au CanadaLes autorités réglementaires canadiennes confirment que la vente de produits de santé non approuvés est illégale. Cependant, au Canada, le finastéride topique est considéré comme une préparation magistrale, c'est-à-dire un médicament fabriqué sur mesure par un pharmacien à la demande d'un médecin.
Bien que cette pratique soit autorisée pour un usage individuel, la Loi sur les aliments et drogues du Canada interdit la production de masse et la publicité de médicaments composés.
Malgré ces restrictions, de nombreux sites Web canadiens font ouvertement la promotion du finastéride topique, en présentant des bouteilles de marque élégantes sur leurs sites Web et leurs publications sur les réseaux sociaux.
Ces publicités sont problématiques, affirme Jean-François Desgagné, président de l'Ordre des pharmaciens du Québec.
Plus tôt cette année, les journalistes d'Enquête ont testé trois plateformes de télémédecine, obtenant des ordonnances de finastéride oral auprès d'Essential Clinic, de Jack et de Rocky. Cette expérience a conclu que les consultations médicales proposées par ces sites étaient rapides et superficielles, les professionnels de santé fournissant très peu d'informations sur les risques associés à ce médicament.
Ni Rocky ni Jack n’ont répondu à nos courriels concernant le nouvel avertissement de la FDA et les commentaires de Santé Canada.
Hisham Al-Shurafa, cofondateur de la clinique Essential, a déclaré qu'il vendait du finastéride topique depuis 2021. Il a noté que la brochure d'information sur le produit indique clairement qu'il n'est pas approuvé par Santé Canada.
Toutefois, les clients qui naviguent sur le site pour obtenir ce médicament ne sont pas obligés de consulter ce document. L'absence d'approbation par Santé Canada ne semble être mentionnée nulle part ailleurs sur le site web d'Essential Clinic, ni dans ses publicités pour le finastéride topique.
Les responsables de Santé Canada affirment avoir reçu depuis janvier 2024 cinq plaintes concernant la vente et la publicité de produits à base de finastéride sur divers sites Web.
Dans deux cas, Santé Canada a envoyé des lettres réglementaires aux entreprises responsables, les informant de la non-conformité et leur demandant de cesser leurs activités. Deux cas sont toujours à l'étude par le ministère, et un cas n'a révélé aucune non-conformité.
L'agence n'a pas précisé quelles entreprises étaient visées.
cbc.ca
